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Le stress et le langage

L’une des motivations les plus courantes qui mènent à consulter un hypno-praticien ou un thérapeute, voire un médecin, c’est le stress.

Celle-ci n’est certainement pas l’affirmation du siècle qui va me faire gagner le prix Nobel de sagacité… Non, mon but aujourd’hui c’est de regarder derrière le voile qui enveloppe le stress. Plus précisément le mot stress.

Posons nous la question : qu’est-ce que le stress ? Sommes-nous sûrs de la signification exacte de ce mot que nous employons pourtant quotidiennement? En avons-nous une claire définition en tête ?

Peut-être un mal-être général ? Une condition inconfortable ? Une surcharge sensorielle ? Une émotion moins agressive, mais plus fréquente que l’angoisse ?

Tout me paraît cohérent et acceptable, mais allons poser la question au dictionnaire :

stress

nom masculin

(anglais stress, effort intense)

État réactionnel de l’organisme soumis à une agression brusque

Larousse.fr

Le stress semblerait donc être une réponse automatique à l’action aggressive et soudaine d’un élément dérangeant… mais de quoi parle-t-on ?

Il faut d’abord comprendre que la notion courante de stress psychosomatique a été introduite par l’endocrinologue québécois Hans Selye, en 1956 seulement, dans son essai « The stress of life ». Précédemment, le mot stress n’était utilisé que dans les domaines de la physique et de la mécanique (Wikipedia). Avec Seyle, stress se charge de modernité et permet de concevoir la condition de l’homme qui, comme la matière, serait soumis à une pression exercée par la vie. En même temps, stress fait ses bagages et part s’installer dans les vocabulaires des autres langues qui l’adoptent comme un nouvel anglicisme.

Curieux, n’est-ce pas ? Un mot anglais venu du Nouveau Monde pour rendre l’idée de cette nouvelle condition humaine (!).

Or, tout mot n’est pas forcément traduisible d’une langue à l’autre. Il suffit pour s’en convaincre de prendre l’exemple du mot ilunga, qui, en langue ciluba, signifie : « personne prête à pardonner n’importe quel tort subi une fois, à le tolérer une deuxième fois, mais non pas une troisième » (A. Biscaldi, Relativismo culturale, UTET, 2009).

Mais stress ?

Selon l’Online Etymology Dictionary, le terme stress est apparu dans la langue anglaise autour de 1300, et signifiait « difficulté, adversité, force, pression ». Ce n’était que l’abréviation de distress, dérivé du français ancien estrece « étroitesse, oppression », dérivé du latin vulgaire strictia, à son tour dérivé du latin strictus « étroit, compressé, serré ».

Et maintenant que l’anglais nous a ramenés au français, maintenant que l’étymologie de stress est dévoilée, que sa signification est enrichie, saurions-nous l’utiliser à juste titre lorsque nous essayons d’exprimer nos émotions ?

J’y reviens ici, j’insiste et j’insiste : appropriez-vous votre language, ne le subissez pas, ne vous en servez pas approximativement comme d’un outil sans notice, car, comme le disait bien le philosophe Ludwig Wittgenstein :

« Les limites de mon langage signifient les limites de mon propre monde. »

… et si mon monde s’arrête à un anglicisme dont je ne connais pas trop la signification ni l’origine, comment puis-j’évoluer vers d’autres conditions physiques, mentales et émotionnelles ?

“You think, I dare say, that our chief job is inventing new words. But not a bit of it! We’re destroying words—scores of them, hundreds of them every day. […] Don’t you see that the whole aim of Newspeak is to narrow the range of thought?”

George Orwell, 1984

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